Je jure haut et fort, avant de tenter d'ouvrir les deux portes d'entrée de nouveau. J'en avais assez. La plaisanterie avait assez duré, et mon ordinateur m'attendait. Pourquoi est-ce que j'étais bloqué dans une fichue école abandonnée, avec une... fille ? Des fantômes ?

Je fronce les sourcils, avant de laisser la porte tranquille, et de sortir fébrilement mon vieux téléphone portable. L'écran était brisé, une large fissure le parcourant, et les touches les moins utiles manquaient. Et l'écran tactile déconnait aussi, par endroits, mais c'était tout ce dont j'avais besoin. Je parcours quelques SMS écrits par moi même, pour moi même. Des histoires. J'ai toujours rêvé de devenir auteur. De voir mon nom, Keisuke Haruna, sur un roman. Devenir célèbre grâce à ma plume. C'était une chose que je savais difficile, mais c'était aussi mon rêve. Ce qui me donnait la force d'avancer. Et j'ai simplement mis ça de côté, pour céder à la panique.

Ces soirées passées devant mon PC à peaufiner ma plume, à fourbir mes armes, au lieu de faire mes devoirs, devant affronter le jour suivant les foudres de madame Piers... Tout ça, en vain ?!

Je soupire un bon coup. J'y voyais plus clair, et une espèce d'étau qui s'était refermé sur mon cœur sans même que je ne m'en aperçoive relâcha toute pression sur moi. Ça allait mieux, et ça se voyait sur mon visage, maintenant apaisé.

- C'est que je suis en train de perdre les pédales, moi... j'vais me calmer un bon coup, ça ira mieux...

J'observe Keisuke désespérément . Je ne sais pas pourquoi mais je savais que ça n'allait pas être aussi facile ... M'enfin, il a l'air plus .... Détendu depuis qu'il a brandi son téléphone portable . Il est en si mauvais état, je peux le voir depuis les quelques mètres qui nous séparent . Si j'étais à sa place, je l'aurais remplacé il y a déjà bien longtemps ...


Je m'approche doucement de lui, les mains dans les poches, et je le regarde comme si de rien n'était .
Mais ce n'est pas le moment de rester planter, cet endroit ne me plaît pas ... Cette pièce surtout ... D'après les chaussures qui y traînent et les salles de classes dans lesquelles nous sommes allés, nous serions dans une école primaire ? Ou même une maternelle ? Ça expliquerait les petites chaussures, les petites tables et les chaises de la même taille, les vois d'enfants et leurs apparitions ...

-Bon, on devrait peut-être bouger, non ... ?

Je disais ça sur un ton sec, sans même savoir où nous pourrions aller . On a visité toutes les salles que l'on pouvait ... Mais peut-être que la fille que nous avons croisé peut nous aider ?

-Peut-être que cette fille là, sait quelque chose sur le moyen de sortir d'ici ... Elle a peut être mentie parce qu'elle ne nous connaît pas ?

À mon tour de m'accrocher à un faux espoir . Mais on dit que l'espoir fait vivre, alors je continuerai d'espérer deux choses : Nos retrouvailles avec le reste de nos amis, et notre "évasion" de cette école ....

Je soupire longuement, avant de me retrouver progressivement. J'enfonce mes mains (et mon téléphone) dans mes poches, reprenant mon air neutre.

Il se raccroche lui aussi à de faux espoirs, et nous avons pourtant entendu la même chose. Il n'y a pas d'échappatoire, simplement la promesse d'une mort prochaine. Mais... il faut l'affronter, le regard haut, sans en avoir peur. Sans céder à la panique, comme j'ai pu le faire. Chikamasa tenait actuellement une piste. Cette fille, même si je me suis mal comporté avec elle, était quelqu'un après tout. Il l'a dit lui même. Il ne faut pas mourir seul. Profiter des derniers instants. Même si ça doit être avec UNE parfaite inconnue.

- Ça reste une possibilité. Retrouvons la, elle ne doit pas être bien loin.

Je le suis de nouveau. Il faut bien dire que ce type est bien l'un des seuls ponts qu'il me reste avec tout ce que j'ai connu. Je serais comme perdu sans lui. Le serait-il sans moi ?

... Vas savoir...

- C'est une fille, après tout. Elle doit se reposer tous les cinq pas si elle veut pas finir essoufflée par la distance.

Sa remarque m'a fait bien rire . Je le connaissais assez bien pour savoir qu'il répugnait les filles ... Pas forcément au point d'en devenir gay, mais c'est du haut niveau quand même . D'ailleurs, je ne me pose la question suivante que maintenant, mais comment a-t-il fait pour supporter Izumi, Setenza, Shinozaki et Nakashima tout ce temps ? M'enfin, on s'en fiche sûrement ...


J'esquisse donc un petit sourire un coin après sa dernière phrase et je prends finalement l'escalier qui nous guidera vers le dernier endroit où on a vu cette fille, sans dire un mot, mains dans les poches .

(HRP : La suite du RP à l'étage, sauf si y a un event entre temps au rez-de-chaussée ou si Keisuke a autre chose à dire avant de monter)

Je ne pouvais simplement plus bouger . La peur ... Le dégoût ... Et surtout, la surprise . Je rêve ? Non, ils n'étaient pas là enfin ! Je pourrais jurer qu'ils n'étaient pas là avant ! Mon dieu ... Mais . Je me surprends à jurer le nom du seigneur alors que je ne suis même pas croyant . Qu'est-ce qui se passe ?! C'est impossible ! Et ... Ils sont dans un de ces états ...

Je ferme les yeux, ne voulant plus avoir cette vision d'horreur, et respire à plein nez pour me calmer . Mais l'odeur des corps pourrissants n'aide pas ... J'inspire et expire donc par la bouche, une main au ventre et la tête baissée . Je ne vais pas vomir ENCORE une fois . Mais bon sang, qu'est-ce que ces fichus corps font là ?! Et pourquoi y en a-t-il autant ?! Je souffle un dernier coup, redresse ma tête et me calme assez pour ne pouvoir dire qu'une phrase :

-Bordel de ... M*rde !?

Cette école me met la pression . Trop de pression . J'ai du mal à penser . Trop de questions sans réponses, des questions qui ne devraient même pas être posées . On est à peine "arrivé" que je n'en peux déjà plus . Trop, c'est trop ...

Je ne peux m'empêcher de descendre l'escalier, et de me poser sur le sol qui se trouve avant le reste des escaliers menant au rez-de-chaussée . Je ferme les yeux, et secoue la tête dans tous les sens, espérant que mes idées se clarifieraient . Je repensais aux moments passés entre amis, où je passais un peu pour le plus grand des intellos du monde . Ça me faisait rire, de voir comment des informations aussi banales que la théorie des cordes, les problèmes de maths donnés en guise de devoir (qui au passage, sont dignes d'une classe de maternelle à mes yeux [Message RP)) et d'autres choses qui semblaient choquer profondément mes amis . Je m'amusais à répondre à toutes leurs questions, sans la moindre difficulté ... J'aimerais revivre ce genre de situation . Je veux retrouver le reste de nos amis .Et quand on veut, on peut . Je sers le poing en signe de détermination . Je VAIS retrouver le reste de la bande . Ou plutôt NOUS . Je n'oublie pas Keisuke, bien évidemment .

Finalement, je me relève, un peu plus calmé, et m'appuie sur le mur, soufflant par la même occasion ...

Mes yeux ne purent que s'ouvrir devant le spectacle qui s'ouvrait à nous. Sept environ. Sept cadavres, sept gars morts ici, les yeux écarquillés, comme si la dernière vision qu'il avaient emporté était une vision d'horreur. D'une terreur primale. De souffrance, peut être... sûrement, en fait, à en voir leurs blessures. Du sang s'écoulait lentement de leurs blessures béantes. De leurs membres tranchés, coupés, découpés grossièrement. Un mélange atroce de sang et de tripes traînait au sol, non loin. Manquant de vomir d’extrême justesse, je ne parviens qu'à murmurer du bout des lèvres, comme si mon souffle avait été coupé net

- Sainte merde... Qu... qu'est-ce qui vient de se passer... ?

La pression revint, et lorsque je la sentis, mes pensèrent allèrent à mon téléphone cabossé, traversé de cette longue cicatrice, et des textes de moi même qu'il contenait. J'étais mort de peur à l'idée que quelqu'un ne vienne y lire à mon insu mes écrits. J'étais un apprenti auteur... qui craignait de se faire lire. Malin. Il me semble que Queneau... ou était-ce Balzac, qui avait parlé des personnes lisant les premiers essais de texte, avant que les livres ne soient publiés, d'une simple ligne. "Je n'apprécie pas exhiber ma cuisine à autrui", avaient-ils dit dans un article de journal, quand des personnes leur avaient demandé des extraits de leur prochain bouquin.

... Mais... très peu importe. Je n'allais sûrement pas penser à la cuisine en regardant ce qu'il restait de ces pauvres types. Il y avait même des enfants parmi eux, à en juger par la taille des cadavres. Cet endroit... était atroce. Si tout le monde et moi en sortons un jour... est-ce que j'en serai capable ? De vivre, et de grandir comme les autres ? De garder un sourire vissé sur mes lèvres, ignorant ce que j'ai vécu dans une fichue école sombre remplie de cadavres ? Tout simplement impossible. Quelque chose en moi était en train de mourir, j'en avais conscience. Un bout de clarté mentale, je suppose, qu'il me manquera à jamais. Je n'en deviendrai pas fou pour autant, j'imagine. Mais quelque chose dans la beauté de la vie que je vivais aura disparu. J'aurai vu ce que je n'avais pas à voir.

Quoi qu'il en soit, alors que les pensées fusaient en moi, la vie continuaient. Ou le lent spectacle d'une mort prochaine, je veux dire. Je pensais à sortir, il y a un instant ? Je n'en ai pas, et n'en aurai jamais la possibilité. Je détourne le regard, croisant celui de Chikamasa. Il n'allait pas bien, et ça se voyait. Nous devons probablement faire la même tête choquée, après tout.

- Chika'... ça va, mon gars ?

J'étais perdu dans mes pensées . Je ne savais pas quoi dire ni quoi faire . Perdu . C'est le seul mot que j'ai en tête . Relié à une question . Sommes-nous perdus ? Tous ces corps ... Certains sont recouverts de blessures de part à et d'autre, d'autres ont seulement une blessure, mais qui sont bien plus ... Horribles . Je me demande si de leur vivant, ces enfants ont du subir ça jusqu'au bout, ou s'ils étaient déjà morts quand on leur a ... Ouvert le corps un peu partout ...

Un autre mot me revient en tête, et je viens de m'en rendre compte . Blessure . Là aussi relié à une question . Serons-nous "blessés", voire même tués de la sorte ? ...

Je ne me sers plus du mur comme appui, mais je maintiens mon visage avec ma main droite, soupirant une dernière fois . Je me frotte rapidement le visage et redresse ma tête, croisant le regard de Keisuke .

-Bah tout va bien, on est enfermés dans une école maudite, on parle à des fantômes et on se balade au milieu des cadavres . Que demander de plus ?

Au vu de la situation, je disais ceci bien évidemment sur un ton sarcastique . Mais tout de même, on peut soupçonner une pointe de colère . C'est vrai que sa question était rhétorique, mais quand on voit où on se trouve, c'est normal ... Je me calme un peu .

-Pardon, me suis un peu emporté ...

Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de donner une réponse directe à sa question, Keisu' aura bien compris comment je vais . Et à mon avis, il ne reste pas non plus indifférent face à cette vision d'horreur . Je ne sais pas pourquoi, mais j'ai envie de lui reposer la même question .

-Et toi, ça va ?

J'hausse doucement les questions alors que Chikamasa pose cette question à son tour, commençant mon chemin vers l'escalier (A), encore déboussolé parce que je venais de voir. Je crois que plus de distance il y avait entre ces sept pauvres gars et moi, mieux ce serait. Il est des choses qu'il est impossible de voir, et peut être que ces sept là resteront dans mers mémoires, et ressurgiront partout. Jusque dans mes rêves.

Mais je pense trop. Je lui répond avec une certaine ironie, un sourire de côté se dessinant sur mon visage rendu pâle par cette vision de cauchemar.

Tout va plutôt bien, on est enfermés dans une école maudite, on parle à des fantômes et on se balade au milieu des cadavres. Mais au moins, la seule fille du coin est soit morte, soit en train de se promener dans le coin, donc ben... c'est toujours ça de pris, si tu vois.

Je fourre mes mains dans les poches, regardant le sol au parquet consciencieusement défoncé, avant de respirer un grand coup, tentant sans grande réussite de garder mon calme.

Chikamasa... Tu te souviens dans cette journée, au début de l'année ?

Tentant de garder mon calme, élément psychologique désormais des plus précieux, j'esquissais un petit sourire en coin après sa remarque à propos de cette fille . Ces corps m'ont fait oubliés notre objectif ... Je me demande si Keisu' a raison ... Est-elle morte ? Soudain, une autre question me vint à l'esprit . Je me souviens qu'on ne pouvait pas aller bien loin à l'étage supérieur, alors où est-elle passée ... ? Je n'ai pas l'impression qu'elle se trouve au milieu des cadavres en tout cas .

Comme Keisuke le fait, je donne une certaine attention au sol délabré, histoire de regarder où je mets les pieds . Je progresse doucement jusqu'en haut des escaliers, en faisant attention de ne pas regarder à nouveau ces corps . Ensuite, je réponds sur un ton amical ...

-Tu sais, y a eu beaucoup de journées au début de l'année . Et puis avec toi, sans vouloir t'offenser, elles se ressemblent presque toutes ...

On arrive finalement en haut des escaliers . J'attends toujours une réponse de Keisuke, en avançant doucement et en regardant mes pieds . Pour trouver cette fille, on a pas le choix, il faut passer . Je m'empêche de tourner ma tête . Pas besoin de me le dire deux fois avant de comprendre que cet endroit est dangereux . Mais je ne comprends toujours pas une chose ... Comment sommes-nous arrivés là ?

Je pointe du doigt le topic que j'ai créé dans la section des RP divers, un sourire léger aux lèvres, avant de répondre d'un air détaché :

Peut être. Mais il y avait CETTE journée. En Octobre.

(HRP : Pardon, j'avais oublié ^^')

J'ouvrais les yeux, d'un air nostalgique avant de secouer la tête doucement . Je dois bien avoir l'air d'un idiot, oublier une journée comme ça . Je regarde Keisuke d'un air bête et innocent ...

-Ah, oui ... Oui oui je m'en souviens, évidemment ! Dis-je en me frottant l'arrière de la tête .
-Pourquoi tu me demande ça ?

J'hausse les épaules, observant le parquet de l'air neutre et détaché qui m'était propre. Cette expression sur mon visage était, est et sera éternellement une façade. Un bouclier, qui me protégeait de montrer mon jeu. Ce que je ressentais. On s'est souvent demandé si j'étais au moins capable de ressentir. On m'avait aussi pris pour un benêt. Je cachais mon jeu. Je me renfermais sur moi même comme je l'ai toujours fait depuis...

Je soupire longuement, avant d'hausser les épaules, finalement. M'accrocher à de vieux souvenirs. A des souvenirs heureux, était finalement tout ce qu'il me restait.

Cette journée d'Octobre avait mal commencé, mal continué, mais ne pouvait pas mieux finir.

J'avais rencontré le premier, et aujourd'hui l'un des seuls types que je considère aujourd'hui comme étant un ami. Quelqu'un en qui je pouvais compter, et sur qui il pouvait compter.

Chikako Ogawa.

En cette journée d'Octobre, au début de l'année scolaire en cours... une partie de la pluie qui me frappait sans arrêt avait cessé.

... Je déteste la pluie, Chikamasa. Merci d'être ici, même si c'est loin d'être dans notre intérêt commun. J'aurais voulu te voir loin. Si loin, en ce moment même, mais je crois que je ne peux pas refaire les choses de cette manière.


- Vas savoir. Dis-je enfin, les mains enfoncées dans mes poches, mon air neutre au visage. Tu t'en rappelles ?